Pour l'Italie, nous avons en cours trois projets. Le premier,
déjà commencé lors du précédent
quadriennal, est celui d'Olivier Mattéoni, menè
en collaboration avec Guido Castelnuovo. Un nouveau projet,
élaboré par Patrick Boucheron dans le cadre de
l'Institut Universitaire de France, est en cours de développement.
Un troisième n'est encore aujourd'hui qu'à l'état
de projet : nous aimerions en effet nous associer aux programmes
menés par nos collègues italiens (Giorgio Chittolini
et son équipe milanaise) sur les langages du politique.
" Sacré, souverainetés et théorie
politiques "
Patrick Boucheron
Le programme "Genèse de l'État moderne"
a sans doute poussé aussi loin qu'il était possible
la démarche comparatiste, croisant les apports d'historiographies
nationales d'autant plus fermement constituées qu'elles
abordaient la question, toujours sensible, des formes politiques
de la souveraineté. De l'avis même de ses organisateurs,
cette rencontre n'a pas été sans heurts ; elle
butait nécessairement sur des divergences irréductibles,
qui tenaient sans doute au poids des traditions historiographiques
mais aussi, plus profondément, à celui des théories
politiques qui les ont soutenues ou inspirées.
Traditions historiographiques et théories politiques
ont déjà fait l'objet d'une confrontation critique
il y a de cela dix ans. Le moment est venu de reprendre et d'approfondir
ce travail, à la lumière du renouveau de la philosophie
politique. Dans un premier temps, ce type de démarche
pourrait s'appliquer à éclaircir les rapports,
entre les notions de sacré et de souveraineté
dans la construction idéologique des États à
la fin du Moyen Âge. En effet, des travaux récents
en philosophie politique permettent de rendre à l'idée
de sacré sa puissance et sa singularité, notamment
en la détachant de la sphère, bien plus évanescente,
du " religieux " : je pense en particulier à
l'uvre de Giorgio Agamben, et au dialogue critique qu'elle
noue avec les travaux d'Ernst Kantorowicz.
Une application particulière de cette réflexion
théorique pourrait consister en l'analyse des rapports
entre religion civique, mémoire urbaine et jeu politique
dans l'Italie de la fin du Moyen Âge. Il s'agirait de
reconsidérer la notion de " religion civique "
italienne, et l'envisager comme l'envers du rapport qui s'établit
entre sacré et souveraineté dans les systèmes
politiques monarchiques. L'analyse des sociétés
urbaines italiennes permet donc d'établir une alternative
possible au développement des États occidentaux,
et d'affirmer par conséquent que ce dernier ne fut ni
fatal, ni irréversible, mais résulta toujours
de choix sociaux, eux-mêmes dictés par des rapports
de force. Ce que les historiens appellent aujourd'hui "
religion civique " est moins une instrumentalisation politique
du religieux qu'un déplacement des frontières
entre sacré et profane. Son analyse permet de saisir,
au-delà de l'idéal d'unanimité sociale,
la manière dont le recours au sacré divise autant
qu'il rassemble, à la faveur de moments de crise où
la ville, théâtre de mémoire, voit s'affronter
des appropriations sociales concurrentes de la memoria civique.
Ainsi envisagée, l'expérience italienne permet
de réintroduire la conflictualité sociale dans
la question des rapports entre sacré et souveraineté.
Etude comparée des structures et des sociétés
politiques France-Italie (XIVe-XVe siècles)
Guido Castelnuevo et Olivier Matteoni
Le groupe de recherches qui s'est constitué sous l'égide
de Guido Castelnuovo, maître de conférences à
l'université de Savoie-Chambéry, et d'Olivier
Matteoni, maître de conférences à l'université
de Paris I Panthéon-Sorbonne, travaille (voir la partie
" Bilan ") sur les entités princières
du nord de l'Italie et de l'espace français (France centrale
et méridionale), de " part et d'autre des Alpes
". Il se poursuivra par deux tables rondes, la seconde
et la trosième du programme.
Le but de la deuxième table ronde est de prolonger la
réflexion comparée des structures politiques des
principautés françaises et italiennes de la fin
du Moyen Age. En choisissant de centrer la réflexion
sur les chancelleries princières, la table ronde entend
s'intéresser à la question de l'écriture
administrative, son contenu politique et ses implications idéologiques.
Plusieurs axes seront privilégiés et proposés
à la réflexion des intervenants, à savoir
:
-
la question de l'organisation des chancelleries : place dans
la hiérarchie administrative et politique ;
- la question du personnel : figure du chancelier dont l'étude
pourra donner lieu à la présentation de quelques
cursus exemplaires ; figures de secrétaires et de clercs
qui oeuvraient à la chancellerie ;
- la question de l'écriture proprement dite et de la
forme diplomatique des actes : langue utilisée (latin,
langue vernaculaire) ; caractéristiques diplomatiques
de la production textuelle dont l'étude devra essayer
de dresser les modifications et d'en proposer une chronologie
; étude du jeu et des modalités d'influence
concernant la circulation de modèles d'écriture
et de formes diplomatiques (en quoi la chancellerie royale
en France est un modèle pour les chancelleries des
princes ? influence de l'écriture humanistique ?) ;
- la question des rapports entre écriture et mémoire
princière à la fin du Moyen Age avec un questionnement
sur la portée idéologique de l'écriture
en chancellerie.
Au
total, la table ronde se veut une réflexion plus générale
sur les rapports entre écriture administrative, construction
de l'état et idéologie princière à
la fin du Moyen Age. La table ronde se tiendra à l'automne
2005. Les actes seront publiés comme les actes de la
première table ronde.
La troisième table ronde portera sur les questions de
la fiscalité des " états " princiers
italiens et français. La table ronde devrait se tenir
à l'automne 2007.
Les langages du politique
Ce projet n'en est pour l'instant qu'au stade des premiers contacts,
mais nous entendons bien le développer, avec ou sans
le concours de l'Ecole française de Rome.
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