2000-2003
[RTF ]
2004-2007
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RTF ]

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Le
projet de GDR [2136] présenté il y a quatre
ans partait de l'observation que l'Angleterre et les
îles britanniques sont aujourd'hui devenues presqu'une
terra incognita pour les historiens français.
Il ne s'agissait nullement d'une fatalité, puisque
jusqu'à la seconde guerre mondiale, les contacts
entre les deux historiographies avaient été
aussi soutenus que féconds. Malheureusement,
après la guerre, seules quelques individualités,
brillantes certes, mais relativement isolées
sur le plan institutionnel, ont maintenu en France la
tradition d'une recherche française sur l'histoire
britannique : citons par exemple Edouard Perroy, François
Crouzet et François Bédarida. Le résultat
a été la presque disparition de doctorants
travaillant sur le monde britannique et ce n'est que
relativement récemment que Jean-Pierre Poussou
d'abord, puis Bernard Cottret, Martin Aurell, Stéphane
Lebecq, Christophe Charles, Robert Frank, Jean-Philippe
Genet et quelques autres se sont enhardis à lancer
des jeunes historiens sur des sujets anglais, sans trop
savoir d'ailleurs quel accueil leur ferait des universités
françaises qui ont pris l'habitude d'exclure
l'histoire britannique de leurs programmes.
Le CNRS a, dans un tel cas, un rôle particulier
à jouer. Il peut aider, par la puissance de ses
laboratoires et par la souplesse de ses structures les
équipes universitaires à cooordonner leurs
efforts et à renouveler leurs problématiques
dans un secteur particulièrement difficile :
il n'existe en effet en Grande-Bretagne aucune institution
qui puisse soutenir la comparaison avec la Mission Historique
Française en Allemagne à Göttingen,
sans même parler de la Casa de Velasquez à
Madrid ou des Ecoles françaises de Rome ou d'Athènes
! Par ailleurs, la collaboration dans le domaine de
l'histoire est rendue difficile par une sociologie de
la recherche très contrastée : les jeunes
chercheurs anglais, sélectionnés très
strictement, bénéficient de post-docs
pour faire des thèses dont la taille et la durée
sont sévèrement contrôlées,
disposant pour cela de bourses et de conditions de travail
excellentes. La thèse est clairement en Angleterre
un exercice universitaire, rien de plus, et elle est
en général publiée après
plusieurs années de travail complémentaire
et de réécriture, générant
souvent au passage la publication de sources ou d'instrument
de travail ; la thèse française est plutôt
un exercice académique, certes assez rapidement
publié après la soutenance, mais préparé
pendant un temps excédant souvent les cinq ans,
et atteignant ou dépassant les mille pages. Surtout,
les meilleurs étudiants sont agrégés,
et faute de monitorats en nombre suffisant, ils ne peuvent
différer leur entrée en lycée ou
en collège. Il est donc presque impossible de
les envoyer systématiquement pour deux ou trois
ans en Angleterre, sauf à les faire rentrer via
un scholarship dans le système anglais, au risque
qu'ils choisissent de ne plus revenir en France, un
D.Phil. leur ouvrant les portes des pays anglo-saxons,
USA et Canada compris ; c'est donc comme professeurs
de collège et de lycée qu'ils doivent
préparer leur doctorat et, dans une telle situation,
un sujet sur les îles britanniques constitue un
lourd handicap.
Le CNRS a accepté le projet de GDR présenté
en 1999, et les quatre années 2000-2003 ont donc
permis le déroulement d'une action qui s'est
déclinée en trois volets : organisation
de colloques annuels sur des thèmes précis,
soutien aux programmes des laboratoires impliqués,
soutiens aux jeunes chercheurs, en leur permettant d'effectuer
des missions d'étude sur le terrain. La structuration
de cette action peut paraître atypique par rapport
à d'autres GDR soutenus par le CNRS, mais elle
correspond précisément à la tâche
que nous sommes fixé :
-
Les colloques sont destinés à développer
les contacts avec nos collègues britanniques
tout en favorisant les rencontres entre ceux qui,
en France, travaillent sur ce domaine ; en même
temps, ils permettent de susciter des problématiques
nouvelles ou d'en revisiter d'anciennes, en laissant,
par la publication des actes, des traces tangibles
de l'action accomplie. Le GDR s'est d'ailleurs associé
à d'autres rencontres, organisées par
diverses équipes, soit qu'il en ait facilité
l'organisation en prenant à sa charge une partie
des frais, soit qu'il en ait soutenu financièrement
la publication.
- Les programmes ont été menés
à bien au sein des différents laboratoires
et des différentes équipes : tout en
suggérant parfois des collaborations et en
favorisant les participations croisées, le
GDR s'est voulu, à sa modeste échelle,
une agence de moyens, cherchant à aider sans
gêner ou interférer avec les équipes.
Ce sont donc les équipes participantes les
plus actives qui ont ici été les principales
bénéficiaires de l'aide du GDR, essentiellement
sous la forme de missions sur le terrain. Au reste,
le rythme de cette activité se modelant sur
celui des laboratoires eux-mêmes, il n'a pas
toujours été facile de scinder le dossier
de renouvellement entre une partie " rapport
" et une partie " projet " et nous
demandons sur ce point précis l'indulgence
des rapporteurs qui seront parfois contraint de jongler
avec notre présentation.
- Les missions aux jeunes chercheurs sont en fait
le plus souvent un prolongement de cette action des
équipes dans le cadre de leur programme, mais
nous leur avons donné une véritable
priorité, tant nous sommes persuadés
que c'est grâce au succès de leurs thèses
de doctorat que pourra se reconstituer dans les années
qui viennent un vivier d'où sortiront les chercheurs
et les maîtres de conférence de demain
; les responsables des programmes comme ceux du GDR
ont d'ailleurs systématiquement cherché
à les faire participer aux divers colloques
et à y faciliter leur prise de parole.
Cette
répartition des tâches s'est en tous cas
rapidement imposée à nous : si les programmes
que nous nous étions fixés se ont effectivement
été en grande partie réalisés,
ce sont surtout les laboratoires organisateurs qui en
ont recueilli les fruits et ont pu apprécier la
cohérence des contenus. Examinés à
partir du niveau central du GDR, ces contenus apparaissent
peut-être plus éclatés. Mais le but
d'un GDR est bien de favoriser l'activité des équipes
qui bénéficient de son soutien et nous avons
donc décidé de relancer les actions sous
ces mêmes trois formes, dans la mesure où
il nous a paru inopportun de créer des " programmes
communs " du GDR qui parasiteraient les programmes
des laboratoires et des équipes existantes. Les
quatre années à venir sont indispensables
pour consolider l'action entreprise, d'autant plus qu'aucun
relais stable ne paraît aujourd'hui encore exister
pour assurer une continuité de la recherche historique
française dans de bonnes conditions. Nous avons
certes noué des relations étroites avec
l'Institute of Historical Research à Londres et
avec la Maison française d'Oxford, et cela sera
un facteur positif pour l'avenir : mais, étant
donné la tendance structurelle à la diminution
du nombre des équipes CNRS on voit mal quelle Université
serait susceptible de créer une UMR couvrant toute
l'histoire des îles britanniques de l'Antiquité
jusqu'à nos jours et limitant ses programmes à
ce seul thème. Serait-ce d'ailleurs une bonne chose
? La formule du GDR apparaît ici idéale car
elle permet de regrouper tous ceux qui travaillent sur
un domaine sans pour autant les couper artificiellement
du reste de la communauté scientifique à
laquelle ils appartiennent pleinement par leur présence
dans leurs équipes. Ceci étant dit, nous
ferons, en conclusion de ce rapport, quelques suggestions
sur ce que pourrait être un prolongement adéquat
de ce second mandat du GDR.
Un dernier point mérité d'être souligné.
Un GDR est une structure légère, mais il
a tout de même besoin d'un support administratif
stable et solide : notre GDR l'a trouvé à
l'UMR 8589, tant à Paris I pour le fonctionnement
informatique grâce à Giulio Romero Passerin
d'Entrèves et Christine Ducourtieux, qu'à
Villejuif où la gestionnaire du LAMOP, Félicia
Yuste, membre de l'UMS de Villejuif que dirige Marcel
Skrobek, a assuré avec sa maestria et son dévouement
coutumiers la gestion financière centralisée
des activités du GDR.
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