Genèse de l'État moderne
Espagne et péninsule ibérique
responsable Jean Philippe Genet
le 1er octobre 2008

 

programme
Espagne...





Pendant le précédent quadriennal, nous avons conservé des contacts avec nos collègues espagnols de l'Universitad Complutense de Madrid (José Manuel Nieto Soria et Miguel Angel Ladero Quesada notamment) et portugais de Lisbonne et de Porot (Armando Luis Carvalho Homem) et établi des contacts nouveaux ave Flocel Sabaté (Université de Lérida) et Francisco Ruiz Gomez (Castilla La Mancha). Par ailleurs, nous entendons bien maintenir les liens noués avec Hipolito Rafael Oliva, désormais en poste à Séville. Enfin, une jeune chercheurse de l'Université de Navarre l'Espagne, Maria Narbona Carceles, doit nous rejoindre en décembre 2004. Cependant, d'une manière générale, c'est à François Foronda, qu'il revient de coordonner nos relations avec la péninsule ibérique et c'est lui qui, après discussion sur le choix des thèmes généraux, inspirés par certaines des spécificités du monde ibérique (par exemple le pactisme ou la précocité et la vitalité des cortès) a monté le projet " Avant le contrat social ".
Ce projet - à la suite de la rencontre de Madrid (2002 sur les Coups d'état, dont la perspective comparée, même si une large place avait été accordée à la Péninsule Ibérique, était pleinement occidentale - vise à prolonger la réflexion sur les fondements du pouvoir politique en interrogeant cette fois la place de la culture contractuelle dans les sociétés politiques de la fin du Moyen Âge. Prévue sur trois ans, sa mise en œuvre est double :
- d'abord un Séminaire d'Études Médiévales organisé à Madrid, destiné à poser les bases d'une réflexion comparée. En 2005-2006, l'accent est porté sur une culture contractuelle précise, celle du contrat d'alliance, dont une mesure est proposée à l'échelle ibérique [mettre lien vers page du bouquin sur le site FRAMESPA]. En 2006-2007 , le champ de réflexion se réduit à la Castille mais pour s'élargir chronologiquement et socialement, et mieux cerner ainsi la diversité de la culture contractuelle dans une société politique donnée.
- ensuite un colloque international, prévu à Madrid les 14-16 avril 2008, qui permettra, à partir de ce thème, d'en revenir à un comparatisme à l'échelle européenne.

Avant le contrat social : le contrat politique dans l'Occident médiéval (XIIIe-XVe siècle) : Projet d'enquête (François Foronda)
Peut-on penser le contrat social avant Rousseau ? Peut-on détacher le contractualisme des idées démocratiques que portent le siècle des Lumières et la Révolution Française ? Le contrat politique fonde-t-il l'État moderne au moment de sa genèse médiévale, sans qu'il suppose pour autant l'accord d'individus pleinement libres et égaux ? Ces quelques questions profilent un horizon d'enquête rétrospectif destiné à interroger une nouvelle fois les fondements du pouvoir politique dans l'Occident médiéval.

Cette perspective se base sur le constat de l'existence de théories et de pratiques contractuelles proprement médiévales et repérables dans l'ensemble des domaines où s'affirme, plus particulièrement au XIIIe-XVe siècle, un pouvoir d'État qui peut-être royal, princier ou encore communal, de tendance absolutiste ou bien encore pactiste. Car de l'Angleterre à la Péninsule Italienne, de la Péninsule ibérique à l'Empire, l'affirmation de ce pouvoir d'État reste inséparable d'un dépassement communautaire, notamment produit par ces puissants vecteurs de politisation que sont la fiscalité et la justice, qui débouche sur la constitution de sociétés politiques élargies et dont le consentement est requis par les États, même les plus absolus, car il reste la meilleure des légitimités et le gage d'une véritable obéissance.

Parce que le contrat politique, formel ou informel d'ailleurs, recueille ce consentement, son étude permet de prendre la mesure de l'engagement volontaire des acteurs dans la sujétion et, plus largement, dans une construction qui, dès lors, n'est plus transcendante mais immanente, et où chacun des sociétaires, selon son état, se voit responsabiliser et reconnaître la place qu'il occupe dans l'État. Toutefois, il ne faudrait pas, à partir de ces considérations quelques peu générales, tendre à lisser le contractualisme médiéval. En effet, la formulation de théories et le recours à des pratiques contractuelles n'ont pas lieu de manière linéaire. Ils signalent davantage certains contextes spécifiques. En général des crises, au cours desquelles s'ouvre le temps des possibles, se joue en raison du rapport de force, notamment, l'élargissement ou bien l'étrécissement des bases sociales des divers régimes politiques en vigueur dans les États occidentaux de la fin du Moyen Âge et, partant, l'établissement ou la révision des pactes les instituant, ceux-ci pouvant être de nature très diverse.

Sans doute, le meilleur exemple de ce point de vue reste-t-il l'Italie, et les trois temps - consulaire, podestataire et populaire - par lesquels en passe le contrat communal, avant que dans l'empilement institutionnel ainsi formé ne s'immisce la seigneurie sans pour autant écrasé la forme républicaine de ces cités-États. Dans l'Italie républicaine, en raison de l'importance du principe de légalité, la tendance contractuelle flirte avec la tendance constitutionnelle. Mais c'est également le cas dans les monarchies occidentales. Ainsi, dans la Castille des Trastamare, à partir des années 1420, l'intense recours aux contrats d'alliance tend à se faire constituant entre les années 1455-1464, marqué par l'implication directe du roi - et c'est une différence par rapport à la France ou à l'Angleterre également concernées par cette féodalité bâtarde - qui, contre l'octroi d'un pouvoir de jure aux Grands de son royaume, compte en finir avec ces coups d'États qui minent de facto sa majesté. En Aragon, les années 1460 témoignent également du saut constituant expérimenté par les tendances contractuelles, en particulier avec la concorde de Vilafranca (1461), considérée comme un monument du constitutionnalisme catalan ; mais sous le mythe de la révolution catalane se dissimule en réalité une réaction néo-féodale sans précédent des oligarchies urbaines et agraires.

Aussi, sous prétexte que le contrat politique est un marqueur de la politisation des sociétés médiévales au moment de la genèse de l'État moderne, faut-il veiller à ne pas le dépolitiser, car son sens est rarement neutre. Dans cet objectif, l'enquête se doit de nuancer les perspectives d'ensemble par des analyses de détail, multiplier les domaines, les niveaux et les angles d'approche, mettre en contraste les théories et les pratiques ainsi que les formes et les contenus, élucider les continuités et les ruptures, bref saisir le contrat politique dans toute son épaisseur historique pour entrer jusqu'au cœur de la relation au pouvoir par laquelle se constituent les sociétés politiques de l'Occident de la fin du Moyen Âge.

Pour traiter ces problématiques, un colloque international est prévu à Madrid, à l'automne 2007, selon des modalités qui pourront reprendre celles de la rencontre Coups d'État à la fin du Moyen Âge ? Aux fondements du pouvoir politique en Europe occidentale (Madrid, 2002), dont les actes seront publiés au printemps 2005 par la Casa de Velázquez et qui avait obtenu un important soutien institutionnel et financier (Ministère espagnol de la Recherche, Casa de Velázquez, CNRS, Laboratoire de médiévistique occidentale de Paris, Université Complutense de Madrid et Institut universitaire de France). Cette formule n'interdit pas de songer, au préalable, à des séances de travail, sous la forme d'un séminaire mensuel ou de journées d'études, pouvant se dérouler à Paris (au LAMOP par exemple) ou/et à Madrid (à la Casa de Velázquez par exemple) au cours de la période 2005-2007, et dont le programme exact reste encore à définir.

Projet " assemblées représentatives ".
Ce projet, envisagé pour 2009, n'en encore qu'aux premières réflexions. Il pourrait prendre la forme d'une série de séminaires (Lisbonne, Madrid, Barcelone) et pourrait s'intéresser à la Castille, au Portugal et aux états de la Couronne d'Aragon.